• e-atelier septembre 2015

     

    Écrivez un texte d'après une des photos à choisir ici :

    http://www.2tout2rien.fr/30-femmes-exceptionnelles-qui-ont-change-le-monde/

     

    SOUFFLE ET MACADAM


    Quelle folie m'a prise ? Que me vaut cette souffrance ? J'aurais eu meilleur goût de me briser une jambe le jour où cette désastreuse idée m'est venue ! Certes, je serais encore alitée, mal en point, mais buvant du thé accompagné de petits gâteaux et d'un peu de chocolat. Au lieu de cela, je me suis jetée dans la furie.Il faut dire que je n'avais jamais vu autant de monde dans la rue. C'était trop tentant. Je m'attendais au bruit, aux bousculades, à ce qu'on me marche sur les pieds. J'imaginais bien quelques remontrances quand à ma présence, misérable jeune femme sans homme à attendre, au cœur de cette manifestation dont la popularité n'avait d'égal que le machisme. Oh oui, je savais que le plaisir ne serait pas facile à atteindre. Et alors ? Il ne l'a jamais été de toutes façons. Je voulais être ici pour trente ans de raisons.Je découvre maintenant qu'en plus d'être stupides, leurs passe temps sont d'une cruauté inimaginable. Ces douleurs, mon dieu. Ce feu qui brûle mes poumons. Ces milliers de coups de couteau me déchirant du ventre aux mollets. Et mes pieds, Jésus Christ, mes pieds semblent chaussés de braises.

    Je dois avancer. Ne regarder que le macadam. Et avancer. Ne pense à rien. Avance. Souffle. Voilà, souffle et macadam, souffle et macadam. Souffle et macadam. Mais lâchez moi bougre d'abruti ! Je cours depuis trois heures ! Mon corps est en guerre et ma tête en folie. Trois heures à penser à vous, à moi, à mon passé, mon avenir, trois heures à essayer de ne penser à rien ! Non je ne vous rendrai pas ce numéro. Il y a trois heures je m'y serais refusée par fierté et soif d'égalité. Maintenant je veux savoir pourquoi vous vous infligez cette torture. Quel diable vous pousse à ce tête à tête avec chacun de vos muscles, tendons, ligaments et articulations ? A ce combat inégal entre l'extrême douleur que l'entièreté d'une ossature contient, et la faiblesse de l'esprit à la dominer. Pendant 42 kilomètres !Je viendrai à bout de ce macadam. Je sais que je le peux, et c'est exactement pour cela que vous m'en empêchez. Vous avez peur. Épargnez-moi la tirade de l'homme protégeant la faible femme. Non ce n'est pas trop dur, nous enfantons monsieur ! Et nous ne pourrions pas venir à bout de 42 kilomètres de souffrances ? Vous avez peur. Peur qu'une fois cette ligne passée par l'une des leurs, les femmes comprennent que rien n'est réservé aux hommes. Vous craignez pour vos places messieurs. Si je peux courir un marathon, je peux être pompier, policier, pilote d'avion. Je pourrais même être cosmonaute si le cœur m'en disait. N'y a-t-il personne pour retenir ce forcené ? Merci monsieur, merci beaucoup.

    Souffle. Souffle et macadam. Battez vous donc à la loyale. Ce ne sont pas vos places que nous voulons. Souffle et macadam. Souffle et macadam. Nous voulons simplement être libres de les courtiser on non. Souffle et macadam. Souffle et macadam. Avance. Il y en aura d'autres. Aucun ne pourra t'arrêter. Avance. Souffle et macadam. Souffle et macadam. Souffle et macadam. Pour ma part et pour le marathon, ce sera non !

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    Tif

     

    Après avoir lu la consigne d'écriture, regardé plusieurs fois toutes ces photos je n'arrive pas à me décider.
    Tous ces clichés, toutes ces femmes… comment choisir l’une plus que l’autre ?
    Elles sont à mon humble avis toutes plus formidables les unes que les autres...
    Regarder, non, admirer... un déballage de courage. Toutes, la tête haute, le regard droit et cette fierté non dissimulée.
    Nous leur devons tant, nous femmes d’aujourd’hui.
    Si je pouvais à mon tour avoir ma photo sur ce mur de progrès, de découvertes, de courage...
    Pour le moment je m efforce de vivre, d’aimer mes proches, de donner de mon temps et de mon savoir-faire, d’élever mes enfants du mieux que je peux. Et mon mur à moi à ce jour se trouve dans les yeux de mes enfants et de mon mari.

    Virginie

     

    Elle est là, seule mais entourée
    Comme toujours debout
    Ce n'est pas facile
    Elle a l'habitude
    Même si ce n'est pas facile
    Seule contre tous
    Elle est tenace, elle le sait
    Pugnace est un mot fait pour elle
    Elle est résolue
    D'aucuns diraient têtue
    Elle sait qu'elle y arrivera
    Certains lui mettront des bâtons dans les roues
    Ou plutôt essayeront de l'agripper
    Mais elle passera, la tête haute
    Toujours, elle a l'habitude
    Elle s'est entraînée dur
    Un kilomètre après l'autre
    Toutes derrière elle
    Elle montrera qu'une femme peut
    Une femme peut réussir la où l'Homme pense avoir l'exclusivité
    Comme dans tant d'autres domaines
    La femme peut être compétente, aussi
    Même si elles doit se battre
    Elle sait que c'est important
    Elle le courra ce marathon
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    Julie-Fée-Bleue

     

    Je suis fatiguée, a-t-elle dit
    Je suis fatiguée de te céder
    Petit blanc 

    De te céder ma place
    De te céder ma vie
    Je suis là
    Assise dans ce bus
    Et je ne bougerai pas
    Mon cul de négresse
    Ne bougera pas
    Je reste assise
    Envoie-moi tes chiens
    Tes loups
    Tes lois
    Petit blanc fantôme
    Qui aime trop ma peau
    Qui brûle ma chair
    Et m’enchaîne
    Tu ne fais que me violer
    Depuis que je suis née
    Me parquer
    Me prendre tout ce que j'ai
    Je suis fatiguée
    Petit blanc
    Je suis là
    Je suis la femme
    Je suis la femme noire
    Qui ne cède pas
    Je m’appelle Rosa Louise Mc Cauley Parks
    Et j'enfante un monde nouveau

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    Hélène Dassavray

     

    Maud, Femme tatouée

    Ornée d’une parure d’encres

    Pause pudiquement devant l’objectif.

     

    Femme tatouée tombée sous le charme de l’homme-tatoué

    Maitrise l’art du tatouage.

     

    L’ébauche à même la peau devient une œuvre dessinée

    Sous l’effet de l’encre injectée docilement dans la chair

    La peau se tanne de couleurs et de formes

    Le corps devient une toile

    Toute entière, à l’exception du visage et des mains

    L’artiste a fait d’elle une œuvre unique et éternelle avec plus de 265 dessins.

     

    Maud, la femme tatouée

    A offert  son corps à l’artiste tatoueur

    Le derme affligé par les milliers d’objets pointus

    De la souffrance née des animaux fabuleux

    Voire sacrés

    Illustrant tantôt le bonheur et la sagesse, le mal et la tromperie.

     

    La femme tatouée

    S’est elle-même tatouée ?

    Séductrice ou femme phénomène

     

    La femme tatouée

    A été regardée….

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    Liek

     

     

     

    Il faut bien connaître l’histoire du XX s.du Caucase pour placer cette photo dans son contexte.

    En tout cas, voici une survivante des massacres et pogroms divers, née en 1884 ! Merci au photographe ! merci pour ce témoignage !

    Une femme est assise, voûtée, sur un lit en fer peint en beige clair, sur lequel sont entreposés des légumes secs ; son regard est déterminé ; les mains aux doigts gonflés et noueux tiennent avec force un fusil : ce n’est pas un simple fusil, un calibre 12 pour les petits oiseaux, ce n’est pas un jouet, c’est un fusil d’assaut, un fusil fait pour tuer les hommes, peut être une kalachnikov… un fusil fait pour des mains d’hommes plus ou moins violents… Les fenêtres de la chambre sont occultées par des rideaux à fleurs.

    Elle attend.

    A ce moment là le regard ne dit rien d’autre que «  c’est ma maison, ma patrie, là ou je suis née, là où j’ai été acceptée, là où j’ai refait ma vie après les exils, là où j’ai pu reparler et transmettre ma langue maternelle… toute ma lignée y est née ! Je ne partirai pas, j’ai eu la longévité en seul cadeau, je ne partirai plus… aucun ennemi ne me fera encore partir ; chacun de nous est comme l’escargot surmonté de sa coquille car nous avons planté nos racines au-delà des fondations de la maison et je suis encore là pour la défendre. 

    Toutes les femmes, à n’importe quel âge, devront être capables de défendre la maison, quand les hommes, les maris, les fils, les pères ont disparus dans les méandres de l’histoire de mon pays… »


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    Nicoleg

     

     

     

    Cette femme est représentative d’actions, d’un combat de dizaines d’années pour une des valeurs que je considère comme un des fondements de notre société, LA DEMOCRATIE.

    Il apparait dans le fonctionnement de notre société, notamment depuis la création de l’union européenne, que la démocratie est souvent bafouée voire violée. J’exagère, oh! à peine, vu ce qui s’est passé après les votes NON lors de référendums, en France et en Irlande. Les mesures repoussées par les votes populaires ont été appliquées en force.

    Par ailleurs, les regroupements qui se dessinent ou s’appliquent déjà, (communes, régions, mégapoles etc…) éloignent les citoyens des possibilités d’agir sur les décisions

    Mad. SAN SUU KYI s’est battue durant 40 ans, pour essayer de rétablir la démocratie dans son pays la Birmanie. Pour cette raison elle fut emprisonnée puis assignée à résidence durant 21ans. Cette mesure fut sans doute prise sous la pression internationale et car elle était la file du général SUNG SAN qui participa puis négocia l’indépendance de la Birmanie.

    Elle fut brièvement sortie de sa résidence en 2007 du fait de manifestations dont les défilés firent le tour du monde celles des moines bouddhistes. Elle fut soutenue par de nombreux mouvements à travers le monde. Pour l’anecdote le groupe de rock U2 lui a consacré une chanson. Aujourd’hui sa candidature à la présidence ne peut-être validée car son mari est étranger ce qui selon la loi, la rend impossible. A suivre…

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    Gérard

     

     

     

    Pierre observait du coin de l’œil sa femme. Rien qu’à l’odeur, il s’attendait à affronter une nouvelle fois la terrible association du chou et de l’absence totale de talent culinaire de sa femme. Un mélange particulièrement éprouvant de désintérêt complet et d’agousie qui, selon Marie, justifiait pleinement que l’on puisse manger chaque semaine de l’année un régime sain, peu couteux et exclusif  de soupe au choux, de soupe aux oignons, de soupe aux betteraves et d’une chose située entre le liquide et le solide, entre le cru et le brûlé, que Marie persistait à dénommer « goulasch » en se resservant goulument, n’y trouvant visiblement rien à redire.

    De l’avis général, l’odeur était ce qui caractérisait le mieux leur pauvre appartement. Un mélange indéfinissable de choux bouilli, de brûlé, d’oignons, mais surtout de fermentation. Marie mettant un point d’honneur à faire macérer elle-même les betteraves pour le bortsch, une odeur sure, pénétrante, s’infiltrait dans chaque fibre des toilettes de leurs invités pour leur laisser un long et entêtant souvenir. Elle en avait un beau fût qui traînait à toute saison, plus ou moins plein, dans un coin de la souillarde.

    Leurs amis auraient peut être continué à venir dîner malgré ces petits désagréments, mais le désintérêt de Marie pour les choses de la maison s’étendait plus largement à toute notion de ménage. Le sol, mi collant-mi craquant, brillait de crasse, et la table de la cuisine ne laissait repartir qu’à regret les mains des convives qui osaient s’y poser. Quand au reste de la maison, il disparaissait sous les caisses d’échantillons de Marie, son matériel et ses cornues. Et ceci quand toutefois on les distinguait encore à travers le voile de poussière qu’elle dégageait continuellement en tentant de réduire  en poudre par divers procédés plus ou moins bruyants les échantillons qu’on lui envoyait du monde entier.

    Tout cela aurait encore pu être surmonté sans la conversation de Marie. Hier encore, elle avait longuement expliqué devant Henri Moissan et Gabriel Lippman, leurs soutiens et amis, qu’elle devait être alcaline. Seul un milieu excessivement alcalin pouvait expliquer ses mycoses à répétition. Sa mère elle-même n’en avait jamais eu tandis qu’elle les cumulait.  Elle avait pourtant éliminé tout laitage de son régime alimentaire – c’était bien alcalin les laitages n’est ce pas ? Elle confondait toujours acide et alcalin- mais rien n’y faisait. Peut être un défaut de sucres lents ? Pierre avait beau dire, elle ne voyait pas en quoi un excès de choux et d’oignons expliquerait le problème. Ils avaient un régime alimentaire on ne peut plus sain. Non, la question de ces mycoses devait avoir une explication génétique à n’en pas douter. En attendant, le radium qu’elle avait pensé utiliser lui causait des démangeaisons et une cystite qu’elle n’arrivait pas à guérir. Non, vraiment, tout cela n’était pas agréable.

    Dans l’odeur de choux bouilli, Pierre était penché sur ses dernières notes. Il revenait sur un problème avec la structure cristalline des topazes : quelques observations incohérentes par rapport à ses précédentes expériences piézoélectriques. Il faisait un grand nombre de pâtés à cause de l’encre qui formait des boulettes avec la poussière de radium et ne parvenait pas à discerner s’il voyait un « 6 » ou un « 5 ». Marie l’interrompît en posant la casserole sur la table, accompagnant son geste auguste d’un « le tîner est serrrvi mon amourrr». 

    Elle se pencha sur les notes de son mari. Ayant fini sa lecture, elle réfléchi un instant avant de lui demander « si ce problème de topaze ne viendrait pas d’une structure pérovskite cubique et non piézoélectrique ? Dans les variantes piézoélectriques, les cations A et B sont décalés par rapport au centre des polyèdres d'oxygènes, ce qui crée un dipôle électrique et confère au Crystal son caractère ferro- et piézoélectrique. »

    Sur ce, elle se mit à table en avalant avec délectation son infâme brouet.

     Ahhhh, ces Polonaises tout de même !


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    C’était : « Les dossiers de l’Histoire ». Une émission France Inter, présentée par Hadrien de Corneillan. La semaine prochaine : « la chtouille de Mara ».

     

     

    « Foule sentimentale »

     

    Hier, à Yad Vashem, le Mémorial des Justes, j’ai planté un arbre…

    J’ai planté l’arbre de l’amitié.

    Ma douce amie, Zejneba, n’était pas là. J’ai pourtant senti sa présence. Un jour, elle reviendra.

    Ils me font rire avec leur histoire de voile musulman qui cache mon étoile jaune. Juste le vent. Le vent des Justes. Le vent de la vie, de la famille qui a sauvé nos vies. Le vent plus fort que l’Ustasa qui régnait en maitre à Sarajevo, ce jour-là. Nous ne nous cachions pas. Nous marchions dans la rue, Zejneba, sa belle-sœur Bachriya, moi, et les enfants de Zej. Nous allions droit devant, dans le vent.

    Zejneba, son mari et son père nous ont cachés dans les combles de l’usine. Le temps pour nous de partir plus loin, en Italie, à Mostar, où les Juifs n’étaient pas poursuivis.

    J’ai porté son voile, j’ai caché mon visage, moi aussi. Une étoile jaune contre un voile. Quelle importance !

    Et puis, je suis entrée dans la Résistance, dans les montagnes. Un fusil, une étoile, un arbre.

    Nous étions des amies. Des amies de la vie. Elle a sauvé la mienne.

    L’amitié n’a pas de religion, de frontière, de juge ni d’avocat, ni de mur entre la Palestine et moi, l’amitié est ce qui semble Juste.

    « Attirées par les étoiles, les voiles  »

     

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     Logette

     

     

    "Atomes crochus"

     

    A première vue, c’est une femme. Une femme comme une autre. Brune, yeux bruns, elle n’a pas le physique d’une Polonaise. Pourtant, elle l’était. Maintenant, elle est Française. Grâce à Pierre. Ou à cause de lui, c’est selon. Y a-t-il un physique typiquement français ? Il lui arrive de se poser la question. D’essayer de trouver une justification aux absurdes canons anthropométriques. Question vite oubliée. Pour elle, les races sont secondaires. On est humain ou non, voilà tout. Puis elle a bien compris qu’il ne faut en aucun cas faire état du visible, surtout ne pas le prendre pour argent comptant. Mais creuser, jusqu’à la vérité pleine. Le microscopique. L’invisible. L’inimaginable – la beauté pure, brute.

    C’est ce qu’il y a à l’intérieur des pierres qui la fascine. Elle entend, elle voit leur cœur battre. Elle se croit en voyage dans ces milliards de riens. Dans ces grammes coupés en mille. Pour cela, il a fallu casser beaucoup. La pechblende, ce  « minerai de malheur », envahit l’atelier. Des tonnes de pechblende et elle, en Camille Claudel de ce métal de pauvre. Elles ont presque le même âge. La même ville. Le même amour pour un homme exilé dans la passion et elles, exilées avec. De poussière en poussière, Marie segmente, sépare. Il s’agit de casser les pierres en cailloux, les cailloux en gravillons, les gravillons en sable, le sable en particules, les particules en particules de particules. De celles-là, extraire la matière nouvelle, pousser les atomes au divorce, demander la garde de leur enfant – un garçon, qui sera prénommé comme un pays natal : Polonium. L'adopter puis attendre la venue de son frère qui ne tardera pas : Radium, comme radieux (pour l’avenir de la découverte) et irradié (Radium est au sommet du panthéon des radiations. Même avec ses éclairs, Zeus ne lui arrive pas à la cheville). Ce sont deux garçons pleins de promesses, mais extrêmement turbulents, voire dangereux.

    Un décigramme de ces métaux, et les voilà classifiés dans le tableau de Mendeleïev. Légitimes. Reconnus. Et leur mère, nobélisée. La première femme à l’être ! Visite à Stockholm, discours, remerciements. C’est assez. Il faut garder la tête froide. Après Irène, Eve est née. Marie est mère de deux filles et deux métaux. Dire qu’il y a du travail serait une litote. Elle n’aura jamais assez d’une vie pour élever ces quatre-là, d’autant plus que si les premières la grandissent d’un amour altruiste, les seconds ne la veulent que pour eux. Vampires, ils la grignotent, le feront jusqu’au dernier globule. Alors Marie mourra. Rongée par l’invisible et l’indolore.

    Elle mourra au deux tiers de sa vie. Plus tout à fait brune. Blanchie par l’âge, à peine. 66 ans, c’est bien peu, mais beaucoup à la fois. Elle aura eu le temps d’inventer, d’espérer, de sauver, de créer. Comme toutes les femmes. Mais ses fils étant d’importance considérable, jamais elle ne sera tout à fait morte. Grâce à eux, ou à cause d’eux. C’est selon.


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    Flore

     

     

     

     

    La photo est en noir et blanc, prise depuis le toit d’un hôtel, on voit la ville qui s’étale avec ses monuments, au loin la mer et au pied de l’immeuble une belle place, déserte.

    Au premier plan une jeune femme, elle semble poser et adresse un sourire légèrement provocateur et fier au photographe. Elle est brune, les cheveux courts, mince, se tient très droite. Elle est belle. A l’épaule droite elle porte un fusil.
    Je regarde cette photo et je ressens une immense fierté mais aussi un infini chagrin.

    L’histoire ne date pas d’hier. Nous étions jeunes, nous avions de la fougue et l’envie de sauver le monde.

    Nous partions au quart de tour, quel que soit l’endroit dès qu’il nous semblait que nous pouvions aider des personnes ou un lieu à retrouver la paix et le sourire. L’injustice et la guerre nous étaient insupportables.
    Nous avons participé à des combats. Mais aussi à aider dans des villages que le monde semblait avoir abandonnés.

    Nous avons vu beaucoup d’horreurs, de sang, de douleurs et d’angoisses. Nous avons soufferts aussi dans nos corps et nos cœurs mais nous avons reçus bien plus en sourires, en amour et en amitié.

    Les mois et les années sont passés, mais pas à la même vitesse pour tout le monde.

    Je suis devenue prudente, presque peureuse, alors qu’elle, elle…

    Je suis presque rentrée dans le rang, j’ai un travail, une famille. Je vis quand même fidèle à mes idées et je continue d’aider autour de moi.

    Mais elle, elle me manque. Elle n’a pas compris mon besoin de me poser, et je n’ai pas compris que ce besoin l’éloignerait de moi.

    Son âme et la mienne sont liées, et malgré ces dix années d’absence, je ressens profondément que je la retrouverai un jour, qu’elle me reviendra.


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    Martine L.

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


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  • Écrivez un texte contenant les mots suivants :

    désert, daguerréotype, ange, ellipse, octosyllabe, dodécaphonique, alternative, griot.

     

    Conseils pour un futur auteur-compositeur.

    Tu veux écrire une chanson, fais appel à la Muse, fais appel à ton Ange.

    N’utilise pas de mot ancien comme « naguère », car « naguère » est au type branché comme « caillou » pour Francis Cabrel.

    On impose souvent l’octosyllabe, il correspond au blues en 4 temps, mais si tu veux faire une valse, c’est 3 temps, c’est mille francs, et ça meurt au printemps.

    Tu vas raconter une vie. Tu vas disserter un instant. Tu auras des pages blanches comme des déserts, bleues comme des ciels d’été, griffonnées, raturées, biffées, un peu comme nos vies. Ecoute un jour un griot, il raconte les ancêtres, l’origine et l’histoire des hommes. Il va de la naissance à la mort, il effleure les enfants, il parle des naissances, des fêtes, des rendez-vous.

    Et si c’est une berceuse, elle commence par « Dodé » (gaffe au nique ta mère), c’est puéril et nos enfants sont futés.

    Tu éviteras, comme dans les films français de tout nous raconter : tu choisis ton héros et tu le laisses tranquille, tu pratiques l’ellipse, nous,  on sait bien qu’il a sorti ses clés, descendu l’escalier, mis de l’argent dans le parcmètre, pas la peine de nous la faire en détail !

    Un dictionnaire de rimes est une alternative, c’est quand même bien mieux quand ça sort de ta tête, ciboulette !

    A toi de jouer, compositeur ! Que  la rime soit légère, augmente parfois les pieds, ne reste pas coincé, imagine un voyage, tu dois nous transporter !

     

    Logette

     

    L’image est ternie, comme mangée par les mites du temps. Pourtant, on peut encore voir la femme en pied, posant à côté du griot. Ce daguerréotype est le seul souvenir palpable que je possède d’elle et de cet homme que je sais être de ma famille.

    La dame, mon arrière grand-mère, a été la première blanche à pénétrer dans ce village de brousse, à 35 km au nord de Libreville. Une dispute l’y avait poussée. Ou un chagrin d’amour. Ou les deux. Mon arrière grand-père, qui ne vivait que pour la foi, était pasteur. C’était un prêcheur né, disposition qui lui avait levé en échange toute compréhension du beau sexe. Il était un prodige de la foi, mais un infirme de l’amour. Lui qui passait toute son énergie à discipliner les nègres entendait que l’on marche droit dans son foyer. Ne pouvant être partout, il attendait de la part de sa femme, sa fille et son beau-fils un comportement exemplaire. Or, si sa fille et son gendre faisaient leur possible, son épouse avait un comportement tout à fait déplorable. Elle n'était ni sévère, ni directive. Elle ne guidait pas cette race inférieure vers l’ascension spirituelle qui lui entrouvrirait - peut-être - les portes du royaume de Dieu. Au contraire. Elle était proche des nègres. Elle souriait, touchait, parlait, demandait, apprenait, même, les rudiments de leur dialecte. Tout le contraire du missionnaire qui devait sévir, commander, enseigner le latin avec droiture et sans tendresse, faire entrevoir l’enfer pour créer en négatif, le paradis céleste. Et ne comprenant rien aux femmes, n’ayant aucune idée du sacrifice qu’il avait imposé à la sienne en lui faisant quitter la Touraine, ne soupçonnant même pas qu’elle  fut malheureuse dans ce pays étrange et que ces nègres lui apportaient le réconfort qu’elle ne trouvait plus chez les siens, il s’évertuait à vouloir la sauver d’elle-même. Châtiments physiques, réprimandes et menaces creusaient chaque jour davantage le fossé qui les séparait. Ils servaient le même dieu, mais où l’un était droit, sévère, dur, l’autre n’était qu’amour et compassion. Le 14 avril 1921 eut lieu la rodomontade de trop. Sentant sa femme lui échapper pour de bon, il la menaça de la punition suprême : l’excommunication. Mon arrière grand-mère, d’habitude silencieuse, sentit des ailes pousser à son verbe. Elle lui rétorqua calmement que, quitte à finir en enfer, où, en outre, elle se trouvait déjà, elle préférait que ce fut loin de lui. Elle prit une robe de rechange, un coutelas, une gourde, son sac à main, un chapeau voilé d’une moustiquaire, fit le détour par la mission pour dire à sa fille qu’elle l’aimait, puis s’en fut droit devant elle. Le pasteur prit pour une colère passagère ce qui était un divorce définitif. Cette femme ne devait jamais revoir son mari qui mourrait deux ans plus tard de la fièvre jaune. Lorsqu’elle l’apprendrait, elle se contenterait de trois pater et trois ave, sincères, pour la paix de son âme, et continuerait à vivre sans plus se soucier du paradis ou de l’enfer. Mais pour l’heure, elle marchait, toute drapée de colère noire, de rancune immense, sans autre alternative que celle de s’éloigner de la mission. Elle était en nage, soupesait sa gourde déjà vide et s’opposait des arguments solides pour rebrousser chemin, oublier sa lubie. Rien n’y faisait. Sa conscience n’était plus qu’une voix lointaine et ses jambes la portaient sans même qu’elle s’en aperçoive ; obéissant à une volonté propre. A l’orée de la jungle, devant un rideau vert d’une densité si extraordinaire qu’elle pensait ne jamais pouvoir aller plus avant, elle s’arrêta et sombra dans un sommeil sans rêve. Le lendemain, elle trouva la force nécessaire pour commander à ses pieds de reprendre leur marche et elle pénétra dans la brousse. Les esprits malins contés par les colons, les serpents, les insectes venimeux, les félins sans pitié, les plantes toxiques ne l’effrayaient plus. Quitte à être en enfer, elle entendait y prendre du bon temps. On n’a que les punitions que l’on s’inflige. La progression était lente, mais elle avait moins chaud que la veille. La canopée lui tissait une ombrelle parfaite.

    Elle mit trois jours avant de tomber sur la grappe de huttes de la tribu Burumbu. Si, à la mission, on l’avait mise en garde contre les dangers potentiels de la faune et de la flore exotiques, on lui avait strictement signifié que les hommes de la brousse étaient le diable personnifié et qu’en aucun cas elle devait s’en approcher, sous peine de voir son âme aspirée par leurs bouches immenses et son esprit mangé par leur verbe démoniaque. Quant à son corps, il serait dépecé sans même qu’on ait pris le soin préalable de le tuer, et sa tête serait réduite puis placée sur une pique pour servir de talisman occulte. A la vue des huttes, elle croyait encore à ces légendes ; pourtant, une seconde après, tout s’était envolé. Ses yeux venaient de se poser sur la plus belle femme portant le plus bel enfant jamais vus. Ils étaient tellement purs qu’ils en devenaient christiques. Ceux qu’elle avait devant les yeux pouvaient être des démons autant que des anges. Elle comprit en un instant qu’enfer et paradis étaient seulement une question de point de vue. Et qu’ils résultaient seulement de la peur, ou de l’absence de peur.

    La femme noire se retourna. Elle vit cette blanche échevelée au corps momifié dans ce qui lui semblait être un linceul et dont l’odeur était celle de la mort. Les légendes contées par les vieilles faisaient état de ce genre de rencontre. Ce qui se trouvait en face d’elle était un humain envoûté par un c’n’oculmbulé – un esprit malin capable des pires tortures. Un regard de ce djinn vous portait malheur sur trois générations, un seul geste pouvait détruire un clan entier. Elle n’avait pas idée de ce que cette femme avait fait pour mériter ce châtiment extrême. Mais elle était certaine qu’il fallait lui porter secours avant qu’elle ne périsse et que son âme à elle ne s’en trouve affectée. Car sous les cheveux fous se trouvait le visage le plus gracieux qu’il lui avait été donné de voir. Voilà comment la beauté fut à l’origine d’une amitié que nous savons profonde, puisque mon aïeule vécut 10 ans auprès de la femme noire et de tous les siens.

    Si nous récoltâmes force détails sur ce périple extraordinaire, nous n’avons en revanche jamais eu que le nom et le visage du griot pour tenter de nous construire un passé. La vieille est morte et à toutes nos questions demeurent seulement les réponses elliptiques qu’elle y apportait. Et pourtant nous étions en droit de savoir d’où nous venions vraiment. Nous aurions dû connaître les prénoms des ancêtres, et les rires et les rites... les octosyllabes de notre passé. Nous l’aurions mérité, nous, et notre peau noire.

    Flore

     

    Dodécaphonique : quel nom barbare ! sept notes qui se suivent, entrecoupées de cinq notes intermédiaires – cela me fait penser à une formule pas chère de voyage pour touristes âgés ! et portant voici une expression musicale des plus nobles, démocratique, chaque notre ayant le même droit d’être entendue, pas une qui domine l’autre, qui lui marche dessus pour être au mieux, une technique de composition récente, n’ayant pas d’histoire pesante à trainer au fil des siècles, quasi contemporaine !
    Mais voilà, que ce soit une formule magique dans le monde musical où chacun des douze sons de l’échelle chromatique a la même valeur, bien que voilà l’exemple parfait de ce que pourrait être la vie politique et sociale, je ne comprends pas mieux cette formulation que toutes les autres…je comprends le sens littéral mais pas musical, car je n’entends pas certaines notes : il manque des plages d’audition et la moindre dictée musicale a été une torture tout au long de mes jeunes années scolaires ; dans une vie antérieure, je n’aurais pas pu être un griot, incapable de transmettre oralement une mélodie sans fautes ! même les gens du désert n’auraient pas pu me considérer comme un ange assis sur l’ellipse du monde du silence… Bien que j’aie eu l’alternative de composer en octosyllabes sur toutes sortes de sujets, ma vie a été parsemées de regrets musicaux – ah, savoir jouer n’importe quel air, comme ça, sans partition, sur le piano, comme ça au violon… les regrets égrainent encore ma vie, regrets couleur sépia, un peu effacés, comme un daguerréotype, moins douloureux, tapis au fond de l’oreille…

    Nicoleg

     

    Assis autour d’un feu, perdu entre rochers et dunes, dans ce désert que nous avions choisi, pour, avec ce groupe nous retrouver. Renouer avec notre âme communiquer avec celles des autres, tutoyer les anges, être partie du tout.

    Le vent jouait doucement dans les cordages des tentes, les buissons d’épineux, les gorges toutes proches,  créant avec les murmures ou les cris d’animaux cette musique dodécaphonique enveloppante propre à ces lieux. Ces lieux, qui mis à nus par l’érosion, semblent alors habités par nos craintes et nos peurs.

    Alors le griot, qui avait rejoint la caravane, commença, en grattant ses deux cordes tendues sur une callebasse,  à nous  conter en  octosyllabes,  les histoires et l’Histoire du désert, inscrites dans l’ellipse du temps, tournant dans l’infini de l’espace. Litanie de l’improbable.

    Comme je regrettais de ne pas avoir d’alternative au numérique que j’avais en mains. L’argentique ou mieux encore les plaques de verre du célèbre daguerréotype aurait beaucoup mieux fixé à jamais ces moments magiques.

    Mais peut-on, peut-on immobiliser la magie?

     

    Gérard

     

    Petite ardoise suspendue au poignet de la porte, entrée libre. Je pénètre précautionneusement dans la petite boutique « Au bonheur des dames » qui se démarque par ses murs en  papiers peints et son haut plafond.

    Ellipse temporelle…

    A l’intérieur, tout le nécessaire pour broder, fils, aiguilles, tissus, jouets en bois et ustensiles de cuisine.

    L’espace est organisé autour d’un grand présentoir circulaire dédié aux objets du monde d’un autre siècle. Une longue vue en vermeil, une paire de jumelles pour le théâtre, une collection de fume cigarettes en ambre et écume de mer avec leurs étuis, une collection de malles anciennes avec coffres, valises à main et de décoration, coussins ornées de broches anciennes en émail et perles fines…

    Un recueil de poèmes de la Comtesse de Noailles ; je lis qu’il a été tiré de cette édition : soixante quinze exemplaires sur papier du Japon de la manufacture impériale, cinquante exemplaires sur papier de Chine… A la page 11, un poème, d’une douzaine de vers octosyllabes qui vantent l’Amour, la Mort.

    je voudrais bien qu'on départage

    le double voeu qui me combat :

    je souhaite ne vivre pas

    Mais je veux revoir ton visage !

     

    Certes, la mort est le seul lieu

    Qui convienne à ce corps trop triste

    Mais il faut encor que j'existe

    Je ne peux pas quitter tes yeux !                                                                

    (…)

    Mon œil se fige sur la Description antiquité « Boite à châles époque XIX° siècle ».Elle se compose de 2 petits tiroirs pour les gants. Ce coffre est en marqueterie de bois de violette, bois de rose et de loupe.

    Dans l’un des tiroirs un objet est empaqueté dans un amas de papiers et de ruban décoloré. Un beau daguerréotype représentant un portrait d’une jeune femme post mortem, la mort représentée de façon romantique dans un parterre de fleurs blanches.

    Le phonographe diffuse en fond sonore une musique dodécaphonique qui accentue le mystère de la photographie telle un ange simulant le repos.

    Je n’ai d’autre alternative que de continuer ce voyage hors du temps, en découvrant des visages africains et des ouvrages illustrés sur l’exploration du désert blanc d’Egypte. L’impression étrange que les griots sortent des croquis en sépia pour chanter les louanges des hommes libres…

     Liéko, le dimanche 14 juin 2015

     

     

    « Mon ange » dit le griot dans le désert, «  pas d’alternative : tu devras chaque matin, avant le grand départ,  écouter mon chant dodécaphonique, comme l’a décidé le dieu du temps, le dieu du pays des sables – pas d’alternative au destin de nos vies, qui tourne comme une ellipse autour du néant ; de notre brève rencontre il ne restera que ce daguerréotype couleur sépia dans une boîte précieuse portée sur l’éternité de ma peau sombre…écris-moi une ultime fois en octosyllabe, comme je l’ai appris dans ton pays, il m’en restera la douceur de ta voix au creux de ma conscience… ».

     

    Nicoleg


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  • Parlez-nous du printemps

     Le printemps

    Débute en mars
    Attendre les saints de glace

    Envie de jardiner
    Allez petites fleurs pousser

    De belles couleurs et d enivrantes senteurs
    Bêcher, ratisser, planter, que de labeur

    Les gros pulls remisés
    Jupes et pantalons rapetissés

    Joli mois de mai arrivé
    Petits oiseaux chantez

    L'été pointera bientôt le bout de son nez
    Alors sortez, dansez, profitez

    Car le printemps est à l'heure
    Et ce n'est que du bonheur....

    Virginie

     

    Pour moi le printemps représente une entité multi-services, offrant le meilleur à l’ensemble des mondes minéral, végétal, animal.

    D’abord un musicien, car les vibrations que nous percevons alors colorent différemment notre quotidien, dans le chant des oiseaux, plus nombreux et plus harmonieux, dans les bruissements au sol des animaux qui s’éveillent de leur hivernage, dans les vibratos des vols croisés des premiers insectes, dans le bruit du vent brassant un air plus léger. Mais aussi loin dans ma mémoire des chansons de Treinet et de Ray Ventura et ses collégiens . « Tiens tiens tiens v’là le printemps qui vient ».

    Puis un peintre avec une palette de verts, du plus tendre au plus sombre, qui se superposent et s’entremêlent dans le mouvement des feuilles et les herbesqui ondulent. Et aussi ces bleus insaisissables dont l’intensité changeante rend difficile l’interprétation. Il est aussi habile dans le noir et blanc, quand arrivent les premières hirondelles virevoltantes dans leur chasse incessante.Enfin les premières touches de couleurs vives quand éclosent tulipes narcisses ou marguerites aux pieds des amandiers de neige fleurie vêtue.

    Un organisateur qui nous pousse au jardin qui préparé attend les semis, les repiquages, les plantations, en échange quel bonheur de mettre en bouche les premières fraises, et de se tacher les mains du jus des cerises hâtives. Il booste nos envies de création de nouveautés et parfois donne la fièvre acheteuse. Mais aussi loin dans ma mémoire les beignets de fleurs d’acacia croquants et parfumés que grand-mère faisait frire et servait pour des gouters d’ogres.

    Un parfumeur de grand talent qui charme nos sens avec une variété infinie d’odeurs, de senteurs, de vapeurs diffuses qui parviennent par vagues au gré du temps. Il sait aussi parfois nous enrhumer d’un subtil pollen qui nous fait éternuer plus que de raison. Mais aussi loin dans ma mémoire, quelques bouquets embaumants de lilas cueillis derrières des barrières voisines et quiun moment allaient égayer la cuisine.

    Une saison à réjouir les cinq sens nous aurait dit Camille.

     

    Gérard

     

     

    Fleur de flore en bouton dans un faune assoupi

    Flotte en son âme rose, et de germe en épi

    Annonce ses épines en allongeant sa tige

    Le faune, avec sa flore, dessinent un prestige.

     

    Les épines piqueuses réveillent l’esprit

    Les pétales rougeoient et enveloppent l’âme

    Renaissance des sens qui ravivent la vie

    Le faune fabuleux déploie son oriflamme.

     

    Tout s’ouvre, tout explose en mille couleurs vives

    Le cœur lui-même ose rougir le sang

    Qui irise le corps et que l’âme ravive,

    Renouveau de la vie au soleil du printemps.

     

    Flore, Aix, 11.02.2000.

     

     

    Printemps 2015, printemps de la colère qui monte…

    La Gronde et la Violence envahissent la Capitale.

    Des cités de matelas en trottoirs parisiens, des perdus y habitent.

    Les pics de pollution étouffent en bronchiolite les bébés en poussette.

    La Ville est sale et triste. J’aime plus les sacs plastiques.

    Les fleurs des marronniers roses et pleines, nous rendent allergiques.

    Les sirènes de police, la nuit, le jour, le soir. Encore le lendemain.

    Chacun s’invective. Chacun est énervé. Chacun pue la tristesse. Chacun se demande de quoi demain sera fait. Chacun court. Chacun pleure. Chagrin gris, l’espoir meurt. Un métro à 5 heures, la rage fait son chemin, claque la porte au suivant, laisse pas passer la dame, ou s’asseoir l’ancien.

    Comme un Printemps de Prague, arrivée de chars russes, liberté d’expression, bafouée, endoctrinée, étouffée. Ils nous passent une loi à 30 députés, libertés d’écouter. Les chars sont nos ordinateurs. Nos métadonnées en étude. Fichés et mis en carte, nos recherches étudiées, profits des sociétés. Des riches s’enrichissent, et les autres consomment.

    C’est bien la première fois que je parle comme ça du réveil de l’hiver. Je faisais la marmotte, j’étais ravie, comblée aux premiers rayons du soleil. J’attendais de la légèreté. Je me sentais belle plante, et la sève montait. J’entrevoyais l’amour aux sourires des passants. Je voyais aux terrasses des gens qui se parlaient. J’étais borgne, même aveugle à la réalité. Je voulais la lumière, les jours rallongeaient.

    Je trempe les mains dans la terre, j’écoute les courges qui poussent, je fais des semis de tomates à l’abri des limaces (que je noie dans la bière). J’embrasse un arbre ou deux. Je remercie les Dieux. Je médite. Je ressens. Je réfléchis. J’en appelle aux Archanges pour nous sortir de ça. Pour me sortir de là.

    Au Printemps de mon âge, on rêvait d’amour, de partages, de générosité, on chantait, et l’on se foutait bien du demain de demain. Et même d’après, le lendemain du mois d’après.

    Quel Monde je laisse à mes enfants ?

     

    Logette

     

     

    Joli mois de mai
    Ton nom fait tinter le muguet
    Secoué dans le vent
    Moi qui t'aime tant
    Fée visite ses clochettes
    En fait sa cachette
    de bleu s'est parée
    sa maman a fêté
    ensemble sont parties danser
    On sait que vite tu vas passer
    et l'année prochaine une nouvelle fois tu seras célébré


    printemps

    pire-tire-mire-sire-si- tenir-pitre-mite-mitre-près-prêt-pris-terre-ris-mentir-prise-trempes-tempe-tri-ni-mi-pis-pise-pet-tripe/

    Une mite prit la mitre d'un sire faisant le pitre et la mit par terre. Elle lui mit une trempe sur la tempe et même pire, si j'ose dire, sur le pet. Il rit en se tenant les tripes et se dit «je dois tenir » et sans mentir, il lui fit une de ces prises puis se tint prêt à partir près de Pise. Il lui dit : « Ni tri, ni mi, je ne veux plus servir de mire, je me tire et tant pis ! »
    Le printemps est vraiment une belle saison !


    Julie 

     

     

    C’est
    Le prince du temps
    Le temps des princes
    La saison avant le bonheur
    Les heures heureuses de la naissance…
    Résolvez la multiplication suivante : beaucoup d’odeurs x plein de couleurs x 1 inconnue « y ».
    Cherchez cette inconnue.
    Vous y trouverez la traduction de la beauté éternelle, du goût simple ( si vous faites vos légumes ), l’étonnement devant la prolifération des cellules divines qui se traduit en roses merveilleuses, en anémones sauvages, en iris glamour, en pommes de terre rutilantes dans leur robe verte, en fleurs de tomates d’un jaune parfait, en courgettes à peine esquissées, en fraises coquines et pressées, en pommiers submergés de corolles rosées ; vite, prévoyez les vases, nettoyez les paniers, dessinez les plans des potagers nouveaux, apprenez les mariages heureux, comme «  le poireau préfère les fraises », «  la carotte n’aime pas la carotte », «  feuilles d’orties fraîches au pied des tomates »…
    Ou, alors, cette mystérieuse inconnue « y », remonte au printemps de l’enfance, de l’enfance et des violettes, des tapis de violettes embaumant les prés autour des fermes ; un printemps fugitif où l’on ramassait, ma sœur et moi, des monceaux de petites têtes violines pour en faire du parfum en les faisant macérer dans de l’eau bouillante ; comme ça ; c’était notre recette secrète que les adultes ne devaient en aucun cas connaître, on était contre eux les adultes avec eux pas de printemps…
    Y a-t-il encore un printemps pour les adultes, en dehors de Printemps 2000, du Printemps de Prague, du printemps temps des pollens,  du massacre du Printemps 1913, du « y a plus de printemps ! » ?
    Si j’étais né au mois de mai, ma vie aurait été un éternel printemps…
    Bonjour, bonjour, monsieur Printemps !

     

    Fait par moy Nicole Grégoire de Varages

     

     

    Le mois de mai m’évoque des souvenirs d’enfance, mêlant odeurs et impressions en tous genres… Comme ces photos souvenirs à la Hamilton, indémodables, juste le flou de l’objectif, qui évoque à demi-mots la perception du moment… de l’instant.
    La couleur dominante : le violet, entre les pourpres et les bleus comme cette allée d’hortensias ou le bouquet de violettes ramassées en couronne dans un vase, petit format… tout en miniature.
    Le bougainvillier dans sa grandeur estivale, faisant face à la mer méditerranéenne ou la glycine centenaire qui nous offre une cascade de fleurs sous la tonnelle, au fond du jardin, du temps secret.
    Le rosier dit mystérieuse qui exalte un parfum de créateur offre une flagrance épicée.
    Les iris sauvages ainsi que les orchidées mettent de l’exotisme dans la garrigue.
    Le mois de mai chante, se métamorphose…
    On dit que le violet est une couleur ambiguë...
    On peut dire alors que le mois de mai est énigmatique…
    Le mois de mai est l’abondance du printemps, son apogée, et sa couleur préférée est le violet, et j’aimerais l’appeler le printemps en violet..

    Liéko

     

     

    Sur un air désolé danser. Se laisser emporter, serrée contre un corps protecteur et rêver. Rêver d'un ailleurs à visiter. Oublier le présent, repartir, virevolter... Écouter le matin se lever.

    Sentir sous l'herbe chaude, la lumière et l'envie. Regarder le ballet des oiseaux et rêver... Rêver d'un recommencement, d'une bulle où éclore à nouveau. Se lever et sentir la caresse d'un soleil naissant au milieu du tumulte, n'être que seuls, grandir encore.

    Mai, tu commences par la pluie et le vent, une sourde menace sur un monde déjà fait.

    Mai, je maudis ton appel, tes promesses enjôleuses et ces mains qui pèsent sur mon cœur.

    Mai, je ne garde de ton attaque perfide que tes lettres.

    Sous un ciel narquois, éclater la bulle, ne garder sur la peau que l'odeur du savon. Effacer le film. Regarder les pousses avancer. Leur éviter les orages et l'éclair qui foudroie. Se reposer enfin au sein du cocon et laisser partir le papillon.

     

    Audrey


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  • Racontez une histoire extraordinaire que vous avez vécu.

     

    Ce phénomène, je l’ai vécu dans le Var, auprès d’une amie qui ressentait dans son être plutôt que dans sa tête des informations, des mots, des images. Nous nous  voyions, comme deux couples de retraités et ses perceptions lui arrivaient plus claires et plus nettes en ma présence, comme si je servais d’antenne à un récepteur d’ondes radio ou télévision. Comme nous avions entamé depuis quelques mois, un travail commun sur les  énergies cosmo-telluriques et la pratique de la radiesthésie, nous précisâmes l’expérience.
    Nous étions assis autour de la table au moment du déjeuner, lorsqu’elle commença à frissonner, elle me demanda de me placer debout derrière elle, de mettre mes mains sur ses épaules. Après quelques secondes cela se déclencha, des mots et des phrases furent énoncées par sa bouche, mais pas avec sa voix.
    C’était l’annonce de ce qu’elle devait faire dorénavant si elle le souhaitait, à savoir aider par le canal qu’elle était, les personnes qui se présenteraient à elle et qui en exprimeraient le besoin. Il fut préciser qu’elle serait guider, mais qu’il lui faudrait quand même faire preuve de vigilance par rapport aux situations qui lui seraient présentées. Enfin le message fut annoncé comme venant d’une dimension vibratoire autre et que dans l’instant la communication était compliquée à établir mais que à l’avenir les choses deviendraient plus simples avec le vécu. Mon amie se remit à trembler, le message était terminé, nous étions tous les deux livides, épuisés, comme vidés après un effort intense. Le repas nous remis un peu en ligne mais nous dûmes boire énormément d’eau. Elle se passa rapidement de son « antenne » et nous vécûmes avec elle quelques aventures aux frontières de l’imaginable…(à suivre peut-être).

                             Barjols dans le Var en 1995

    Gérard

     

     

    Une histoire ex…

    Ce n’était pas extraordinaire, là-bas : une histoire ordinaire pour une vie de tous les jours ; mais à mon sentiment, ça l’était ! Il était bientôt midi, c’était l’heure où les enfants rentraient de l’école primaire, des petites classes… elles étaient minuscules, à les voir de loin, dans la rue, la main dans la main, l’aînée avec son air toujours sérieux et responsable, la petite, pimpante avec sa casquette jaune au nom de sa classe, sautillante auprès de sa sœur, pressées, les deux de voir maman et de raconter ; l’air était doux, un début de printemps, avec quelques pétales qui flottaient dans une légère brise ; un sentiment de joie, comme lorsqu’on arrive au bord de l’océan et que l’on sait que l’on va être bien ; peu de bruit, dans la rue, les autres mères attendant elles aussi les petits, entourées de bonnes odeurs de cuisine ; ils arrivaient, les petits, alléchés à l’idée des makis aux algues et aux grillades de poulet macéré ; presque un moment de plénitude, un moment que l’on va partager toutes les trois, sans personne pour réclamer ci ou ça… Dans la cour où j’attendait, il y avait un grand auvent avec plein de matériel agricole, une forge pour ferrer les chevaux, de grands paniers d’osier, une vieille charrette pas encore réparée, la maison était en face…quand, soudain, le sol s’est mis à trembler doucement, et puis l’auvent à se balancer ; et puis le sol s’est mis à se balancer moins doucement et l’auvent était secoué comme un bateau, à droite à gauche ; et puis quelques cris, et puis les enfants qui sont encore à bonne distance et moi, figée, m’attendant au pire : « vais-je les revoir vivantes…vite, vite, dépêchez-vous… » ; les voilà arrivées, n’ayant pas bien compris cette agitation soudaine ; et puis tout redevenu comme normal ! après tout, c’est normal, là-bas ! chaque jour, les élèves s’exercent à la survie, aux gestes primordiaux, sans panique… jusqu’au grand jour où ce ne sera plus normal…

    Histoire vécue dans les années 1970 ; lors du séisme de Fukushima, je me suis sentie totalement concernée…

    Nicoleg

     

     

    Histoire extraordinaire. Dirait Edgar P.

    Il me suffit de cligner de l’œil pour entendre l’extraordinaire. Autour de nous.
    « Sais-tu que la voisine a eu des quintuplés ? »
    « Le postier ne me monte jamais les recommandés. »
    « Ils ont fait appel à un exorciste, elle divaguait la nuit, avec une voix étrange »
    « Ses citrons sont juste pourris »
    « Il allumait sa cigarette en la retournant, puis il l’embrassait, comme on aime une femme »
    « Elle s’est fait refaire les seins et la bouche »
    « Il peignait des tableaux sans couleur et sans pinceau »

    Entre la synchronicité et l’extraordinaire, il n’y a qu’un pas. Petit pied.

    Je pense à ma fille, elle m’appelle. Je rêve de Gilles crachant des bulles blanches, comme un magicien, il lui arrive une sombre histoire d’incompréhension. Une histoire où il doit se taire. Je tends négligemment la jambe dans le TGV, un enfant turbulent se ramasse la moquette et pleure.

    Le lendemain, j’ai mal à la cheville.

    Quand elle est entrée en prison, elle voulait mourir. Une ancienne détenue l’a soutenue. Elle a murmuré : « Dans ta journée, trouve trois choses extraordinaires, des choses simples, j’ai bien mangé, on m’a souri, j’ai bien dormi… »On m’a donné rendez-vous, rue du rendez-Vous. Vous êtes cernés. Les esprits batifolent avec nos croyances, nos superstitions. Lou m’appelle à 12h12. Je ne marche pas sur les joints des pavés, je marche au centre, je fais un vœu. Je déteste les nombres impairs, je les veux divisible par deux. Je veux pouvoir les séparer pour les faire grandir après. Je fais un loto deux fois par an. Je ne gagne jamais. Même pas trois numéros. Les histoires extraordinaires de nos vies sont nos joies simples et évidentes.
    Le lilas refleurit. J’aime le lilas, j’aime son parfum, j’aime sa couleur, j’aime sa grappe. J’aime le printemps.

    Cette Terre est extraordinaire.


    Logette

     

    Nous naviguons depuis 10 jours et depuis 10 jours, nous faisons le point sur la carte. Nous attendons une bonne nouvelle qui ne vient pas. Nous dérivons au milieu de l’Atlantique, coincés entre le triangle des Bermudes et les Antilles. Nous sommes donc approximativement au milieu de nulle part. Nous aurions dû atteindre les Açores dans quelques jours à peine, mais c’était sans compter sur El Ninio dont l’ombre plane sur le vaste océan. Cette dépression gourmande a mangé jusqu’au moindre souffle de vent, et nous n’avons pas assez d’essence pour naviguer au moteur. Nos voiles sont inutiles. Nous sommes une petite barque au milieu de l’infini, 20 000 mètres de fond, pas de terre en vue. Aucune chance de respecter les délais. Pourtant, personne ne nous attend sur l’île de Flores, nous avons tout le temps. Nous mettrons 25 jours au lieu de 18, voilà tout ! Mais ce n’est pas cela qui compte. Nous avons beaucoup de mal à jouir du spectacle majestueux que nous offre l’océan, parce que nos réserves d’eau sont épuisées. Celle de la cale a croupi, la vache, cette grande poche en plastique recelant un mètre cube d’eau vitale, s’est percée sur une aiguille de bois au début du voyage ; elle est plate comme un sein tari. Les bouteilles qui nous restent peuvent désormais se compter sur les doigts d’une main. Alors, nous envisageons les solutions extrêmes : appeler un cargo à l’aide ou faire fonctionner la cocotte minute. La remplir d’eau de mer, allumer le gaz, raccorder le bout d’un tuyau de plastique sur la soupape, glisser l’autre dans une bouteille vide, recueillir les précieuses gouttelettes de vapeur. Et comme nous croisons un cargo tous les 3 à 4 jours, nous prévoyons de faire les deux : boire la vapeur d’eau en lançant un appel à l’aide. Aussi, nous commençons à nous rationner. Personne ne montre son inquiétude et d’ailleurs, personne n’est réellement inquiet – nous avons confiance. Mais nous sommes réalistes. Nous buvons donc peu. Les journées passent. Tous les jours, le soleil est ardent, il se reflète en milliards de paillettes sur une mer d’huile. Je souris de ce paradoxe : nous pourrions mourir de soif en flottant sur la plus grande réserve d’eau de la planète. Combien se sont rendu fous en buvant l’eau de mer, croyant par ce geste sauver leur vie ? Nous avons donc un avantage : nous savons que cette eau n’est pas consommable ; nous ne mourrons pas fous, nous mourrons secs ! Ou nous ne mourrons pas du tout. L’horizon s’assombrit. Déjà, de gros nuages ouatent l’azur céleste. Alors, nous prions. Nous demandons la pluie et, si possible, de nous trouver dessous. Nous avons déjà vu plusieurs grains nous passer à côté sans possibilité de les atteindre. Mais celui-ci menace vraiment et il a l’air de vouloir nous viser. « Préparez-vous, ça va secouer ! ». Nous nous encapuchonnons dans nos cirés, sortons toutes les bouteilles vides. Mon père hisse la grand voile, la génoise et le foc – ils serviront de gouttières. Nos trois seaux seront des réceptacles. Soudain, l’averse est là ; une de ces pluies qui nous feraient croire à la fin du monde si elle n’était, pour nous, une renaissance. J’ai une petite pensée pour Noé qui a dû se sentir bien seul, face au déluge. Les bouteilles se remplissent vite, nous aurons de quoi finir le voyage en ayant le luxe de boire à notre soif. Nous finissons de remplir les derniers récipients, quand plus rien. La pluie est repartie comme elle était venue : en quelques secondes. Mon père descend à la réserve, en revient avec une bouteille d’eau de source : « C’était la dernière ! ». Désormais, nous survivrons en buvant l’eau du ciel. Qui sont les rois du monde ?

    Assez vite, le statut de reine du monde ne me suffit plus ; je veux être aussi celle de l’océan – l’arrogance de la jeunesse. Je m’amarre à une drisse afin de ne pas être emportée par les courants et plonge dans l’infini. Je place un masque sur mes yeux et m’immerge entièrement. Mais ce n’est pas l’océan qui m’attend. C’est l’espace. La terre est 20 kilomètres en-dessous, la gravité s’est absentée ; il n’y a rien que du bleu, profond, à perte de vue. Je flotte au milieu d’un vide spatial ; je suis une astronaute océanique. L’histoire extraordinaire n’est pas celle que l’on croit. L’extraordinaire n’est pas d’avoir manqué d’eau, mais de m’être trouvée en elle, comme dans un ventre maternel immense. Une petite femme au milieu de la mer, bercée par l’univers, née grâce à l’eau, maintenue en vie grâce à l’eau. A cet instant, je touche du doigt le sublime. La reconnaissance d’être en vie et de pouvoir jouir de ce cadeau. Mon souffle est court, je dois regagner la surface. Je reviens au monde et prends une longue inspiration. Je nais une deuxième fois. La mer vient d’accoucher de moi. Je suis.

    Flore


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  • Pensez à un personnage célèbre existant ou ayant existé et racontez un de ses rêves nocturnes.

    (d'après le livre d'Antonio Tabucchi, Rêves de rêves)

     

    Mais quelle magnifique journée, j'ai bien fait d'organiser cette sortie.
    La famille, les amis, tous ensemble pour une belle balade.
    Tout est réuni pour que ce jour soit à graver dans la pierre à tout jamais.
    Nous marchons les uns derrières les autres, le sable entre les orteils. Nous voici enfin arrivés sur cette grande et belle plage. La mer, le soleil....
    je les entends rire, crier, ils sont à la fois excités et impatients ....
    Mais que font-ils ? Je ne sens plus le sable sous mes pieds, ils courent.
    Mais lâchez moi !!!!
    Non....pas dans l'eau, je n'ai pas mon maillot....
    ARRETEZ !!!!!!!
    Je ne sais pas nager !!!!!!!!

    Un sursaut me sort de mon cauchemar.

    Moïse...

     

    Virginie

     

     

    Barack Obama a rêvé qu'il était blanc dans une maison noire.

    Clément

     

    Rêve de peintre dont on taira le nom ; chacun est à la recherche des couleurs, de la couleur, ou d’une couleur…

    Voici l’histoire d’un peintre qui fut estomaqué pendant plusieurs jours, à la suite d’un rêve déprimant…

    Voici ce que la brume du rêve lui révèle !

    La peinture s’échappe des mains, elle ne veut pas s’attacher à la toile ; le contact avec la toile effraye la couleur ; le peintre ne comprend plus par quelle alchimie ce couple hors du commun pourrait s’entendre… Dans un coin de l’atelier, un ballet de cadres entoilés de frais commence à s’agiter : cette toile là-bas est trop grossière ; celle-ci est trop avide : elle aspire carrément les molécules et la couleur ne laisse plus que quelques traces de pigment ; celle-là est mal préparée : elle est trop grasse et la peinture dégouline sur les pieds du peintre !

    Soudain, dans un froissement lugubre, une main osseuse sort de la toile en faisant un signe de dénégation ; puis un corps décharné s’extirpe de son cadre et vient se coller au peintre, les doigts brisent les pinceaux, décolorent les tubes, rongeant les tableaux inachevés et, d’une voix cristalline de soprano, la créature lui annonce : «  tu seras puni car tu as pris goût aux succès et tu ne te respectes plus ; tu ne penses plus à tous ces maîtres de la couleur et du plomb dont on a méprisé, de leur vivant, les œuvres et qui sont morts dans l’abandon, alors que de nos jours, leurs plus modestes œuvres s’arrachent à prix d’or…

    Peintre, réapprends la simplicité et la modestie… ».

    La créature, en fait, s’appelle Conscience : elle est la clé de son rêve…

    A chaque nouveau tableau, il doit tout réapprendre !

     

    Nicoleg.

     

    Cette nuit-là, Frédéric Chopin vient de composer son premier nocturne. La maison de Nohant est calme et l’absence de musique fait résonner le chant des grillons où s’étale, en contre-chant, la respiration tranquille de George. Le soleil va bientôt paraître. Bercé par le silence musical de la nature et de sa compagne, Frédéric s’endort paisible à côté du bouquet de gui placé en offrande au chevet de son lit. Il rêve qu’il déambule dans un salon privé. Des applaudissements se font bientôt entendre et à l’évidence, c’est lui qu’on acclame. Alors, il va sur le devant de la scène. S’assoit. Pour une fois, il est face à son public. Cependant, il ne trouve pas cela étrange. De riches bourgeoises le défigurent à travers les dentelles de leur éventail et attendent qu’il se produise. Il est surpris de ne pas trouver de piano, seulement une petite caisse en bois qui a la forme d’une silhouette féminine, des épaules jusqu’aux fesses, et vue de dos. Dans son prolongement, un long cou de girafe encordé six fois dans la verticale. Il saisit l’instrument et en pince les cordes, ce qui meurtrit un peu ses doigts de pianiste. Le son lui rappelle celui d’un piano sans coffre ou d’un clavecin ; il n’a pas de profondeur. Il trouve cela assez navrant. Ce n’est pas un instrument romantique. Mais la portabilité de la silhouette de femme et du cou de girafe excusent ce défaut majeur - dans la vie, Chopin se désespère de ne pouvoir emporter son piano où bon lui semble. Il improvise une mazurka à six notes, puis se ravise et décide de se servir du manche. Il y place sa main gauche, y plaque des accords pianistiques, tandis que la droite caresse érotiquement le tronc de la silhouette féminine. C’est mieux. Les notes ont plus d’amplitude phonique. Les gammes majeure et mineure existent à nouveau et grâce à cela, il est rassuré. Il va pouvoir donner de la couleur à sa mazurka ; l’habiller de dièses et de bémols. C’est la plus belle prestation de sa vie.

    Il s’éveille en ayant encore en bouche le goût de sa musique. Il aperçoit le bouquet de gui, puis l’heure – il est tard ; plus de midi. Pour ne pas quitter son rêve trop brusquement, il décide de nommer l’instrument. Il associe les deux images de la réalité dans laquelle il émerge. La plante et l’heure. Pour la première fois depuis des semaines, il part dans un grand éclat de rire. Gui-tard. Quel nom ridicule !

    Flore

     

    Un Bébé.

    J’ai dix mois. Peut-être onze ou douze, je ne le sais pas moi-même. Je joue la fille de Rick dans la série The Walking Dead. Je somnole souvent. Et souvent, je rêve…

    J’ai le privilège d’être un bébé acteur. Mes parents  m’emmènent sur le lieu du tournage, chaque fois que ma présence de bébé de la fin du monde est requise. Je passe de bras en bras, et parfois ça m’énerve, alors je chnouille un peu. Je vois des comédiens, des vivants et des morts vivants. Et je m’évade. Des siestes interminables.

    Je fais des rêves de bébé.

    … Je flotte. Je suis aérienne. Je vole. Je suis une sacrée gouteuse de miel. Je suis une abeille. Mes ailes frémissent, je me noie dans les fleurs, j’envahis les pistils. Des mains m’attrapent et je change
    de rêve. Je suis dans les bras du chef, Rick, il est mon autre père. J’aime son odeur. Et sa voix. Il me parle. Il ronronne, sa voix est douce et grave. Je change de bras, je suis dans ceux de mon frère de fiction. Il chante. Il a son grand chapeau. J’en touche les grelots. J’aime le son des clochettes. Je m’arrête un instant devant un arbre blanc. Je veux du sucre. Je butine à nouveau. Je regarde le ciel, je m’envole encore. C’est chaud, c’est doux, j’ai pissé dans ma couche et des gestes aimants me changent, et me nettoient les fesses. Je suis assise par terre, je regarde des fourmis. Je partage mon miel avec elles. Des squelettes  horribles de morts-vivants marchent vers moi.  J’ai peur, je pleure encore. J’entends « Moteur », « Coupez ». Je suis sauvée. Ma journée est finie. Je retrouve mon doudou et mon lit…

    Aussi mes vrais parents.

     

    Logette


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